1. Les conditions de révocation d’un dirigeant sont différentes en fonction des types de sociétés.

Dans les SARL (et les sociétés civiles, comme les SCI ou les GFA par exemple) le gérant ne peut être révoqué par l’assemblée des associés que pour « justes motifs », sous peine de voir la société condamnée à être condamnée au versement de dommages intérêts pour révocation abusive. Le « juste motif » qu’est-ce que c’est ? il s’agit le plus souvent de l’une des hypothèses suivantes :

  • La faute de gestion qui entraîne des conséquences irrémédiables pour la société.  (Exemples : actes engagés dans l’intérêt personnel du gérant, abus de majorité qualifié..)
  • Le manquement du gérant à une obligation légale ou statutaire. (Exemples : refus de convoquer tous les associés lors des assemblées, refus de publier les comptes sociaux, manquement du Gérant qui entraîne la radiation de la société, errements dans la gestion fiscale de la structure, notamment dans la gestion des sociétés civiles)
  • Les divergences de vues sur la politique générale à mener dans l’intérêt de la société lorsque ces divergences reposent sur des éléments objectifs (Exemple : absence de distribution des dividendes de certains associés non motivée lors des assemblées générales…)

2. Or, la majorité des sociétés qui sont récemment immatriculées sont des sociétés par actions simplifiées (SAS), et curieusement, aucun texte n’encadre les modalités de révocation de son dirigent, c’est-à-dire, le Président.

En l’absence de texte, ce sont donc les statuts qui en encadrent cette révocation en prévoyant l’organe social habilité à prendre cette décision, le respect ou non d’un préavis et également l’obligation ou non d’avoir à justifier d’un motif de révocation. Si vos statuts sont rédigés par un professionnel, ils organisent les modalités de révocation du Président. Ils prévoient en général que ce dernier est révocable à tout moment par la collectivité des associés et sans que cette décision n’ait à être motivée. Toutefois, sous une apparence simplicité, ces clauses cachent en réalité une grande rigueur dans leur mise en œuvre. La Cour de cassation est ainsi venue rappeler que même en présence de cette clause, la décision de révocation peut être irrégulière et donner lieu à l’indemnisation du dirigeant révoqué. (Cass. Com 22 novembre 2016 : n°15-14911)

En l’espèce, les statuts de cette SAS autorisaient l’assemblée des associés à révoquer le Président sans avoir à motiver leur décision. Toutefois, compte tenu de l’animosité au sein de cette société, les associés avaient prononcé la révocation du Président en précisant plusieurs griefs à son encontre. Le Président a contesté sa révocation, estimant ces griefs infondés. Dans le cadre du contentieux judiciaire, la société a alors cru opportun d’invoquer de nouvelles fautes imputables au Président pour justifier de sa révocation, or ces nouvelles fautes ne furent jamais évoquées au moment de l’assemblée générale des associés. La Cour de cassation estime que le dirigeant n’a pas pu s’expliquer sur des griefs invoqués postérieurement à sa révocation et considère qu’il s’agit là d’un manquement de la société à l’obligation de loyauté.

3. En résumé :

Même lorsque les statuts de la SAS prévoient une révocation sans motivation, dès lors que la décision fait état de griefs, ceux-ci doivent être portés à la connaissance du Président avant la décision de révocation afin qu’il puisse fournir ses explications. Il en résulte que la société est tenue par les motifs qu’elle a invoqué lors de la décision de révocation, et ne peut pas, par la suite, les modifier ou en invoquer de nouveaux pour justifier de sa décision.

Alexandre VASQUEZ - Avocat au barreau d'Alès (30)

(Les informations contenues dans cet article ne constituent ni un avis juridique, ni une consultation. Pour tout litige ou problématique en rapport avec le sujet traité vous êtes invités à prendre contact avec un Avocat)

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